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Salon de l’Agriculture 2024 : une 60ème édition au coeur de la crise politique agricole

Salon de l’Agriculture 2024 : une 60ème édition au coeur de la crise politique agricole

Du 24 février au 3 mars prochains, le Salon de l’Agriculture permettra aux acteurs du monde agricole de rencontrer le grand public au Parc des Expositions de Paris. Alors que le gouvernement tente de calmer la crise agricole, de nombreuses animations sont prévues. Un espace exclusif pour les professionnels, un hackathon avec Mistral AI, une rétrospective photos et d’autres nouveautés sont prévues pour célébrer la 60ème édition du Salon.

Le Salon International de l’Agriculture (SIA) occupera le Parc des Expositions de Paris à la Porte de Versailles du 24 février au 3 mars prochains.

Plus de 1000 exposants, venus de 30 pays, se retrouveront. Chaque année,  outre une centaine de visiteurs protocolaires, dont traditionnellement le président de la République, 1% des français (autour de 600 000 visiteurs) se rendent à la manifestation. Au vu des revendications récentes des agriculteurs, le Salon promet d’être haut en couleur. Pour apaiser les tensions, le premier ministre Gabriel Attal s’est exprimé lors d’une conférence de presse ce mercredi 21 février, accompagné par le ministre de l’économie et de l’agriculture.

Lors de ce nouveau SIA, 4 000 animaux, représentant  378 races différentes, dont certaines tout à fait exotiques telles que le yack asiatique, le zébu ou le dromadaire, fouleront le sol de Paris. Lors de ce rendez-vous annuel entre les acteurs du secteur agricole avec la population, se tiendront 390 événements, notamment des démonstrations, des concours, et bien sûr, ce que tout le monde attend, des dégustations.

https://www.salon-agriculture.com/A-voir-sur-le-salon/Calendrier-des-animations/Programme-des-evenements-2024 

Une brigade de “désoiffeurs” déambulera dans les halls, pour assurer l’hydratation (avec de l’eau gratuite) des visiteurs afin d’absorber l’alcool ingéré et prévenir des excès. 

Moutons ©Salon de l’Agriculteur

Une rencontre entre professionnels et l’IA à la ferme

Pour la 60ème édition du Salon, un nouvel espace a été ajouté, le SIA’PRO, exclusivement réservé aux professionnels du 25 au 27 février. 

Autre innovation : le premier hackathon sur l’Intelligence Artificielle Générative appliquée à l’agriculture aura, lui, lieu du 26 au 27 février. Organisé par  Mistral AI, la licorne française concurrente.de ChatGPT, et l’association La Ferme Digitale, l’événement aura pour mission d’appliquer les innovations technologiques aux problématiques agricoles telles que le décryptage des normes et des réglementations, la gestion des troupeaux, la conduite des cultures, les achats et les ventes de produits agricoles mais aussi les formations et la transmission des métiers de l’agriculture. Aujourd’hui, 814 000 français ont un emploi permanent dans ce secteur.

Le 25 février de 10h à 12h, des experts échangeront lors d’une conférence TEDx intitulée « un monde en mouvement« , portant sur les transitions qui animent le monde agricole.

Rétrospective et concours

Pour le 60ème anniversaire du SIA, une rétrospective iconographique en collaboration avec Paris Match a été exposée sur les Champs Elysées jusqu’au 15 février. Elle sera à nouveau accessible au Salon et disponible à la vente sous forme du beau livre : “Les plus belles rencontres sont naturelles : 60 éditions du Salon International de l’Agriculture”

Le mythique Concours Général Agricole présentera les plus belles bêtes et les meilleurs produits (le vin et 20 produits régionaux). Cette année, de nouveaux produits, à savoir la choucroute, le caramel au beurre salé, la bière sans alcool et  la confiture extra de figues de Solliès rejoignent les catégories déjà existantes. Tous les ans, les ovins, bovins, caprins, porcins, équins, asins et canins défilent sur un ring durant tout le Salon pour décrocher l’un des prix du Concours sous les yeux ébahis des citadins de tous âges rassemblés pour l’événement. 

Concours bovins ©Salon de l’Agriculture

Une situation politique incertaine

Des hommes et des femmes passionnés, des produits incomparables, des savoir-faire connus et reconnus, des initiatives fortes, des animaux superbes, des débats toniques et des politiques nombreux vont ainsi faire notre fierté et la vôtre je l’espère. Il ne s’agit pas d’occulter que notre secteur subit des soubresauts, mais bien de rappeler son importance vitale pour la France et le reste du monde”, souligne Jean-Luc Poulain, agriculteur, président du CENECA (Centre National des Expositions et Concours Agricoles) et président du Salon.

Depuis début 2024, les agriculteurs font résonner leur colère à travers de régulières mobilisations et actions arrivant jusqu’aux portes du marché international de Rungis, le 31 janvier dernier. Selon l’Insee, 20 % des ménages agricoles vivaient en dessous du seuil de pauvreté (estimé entre 965 euros et 1 158 euros par mois). Les éleveurs sont les plus en reste, touchant en moyenne 945 euros par mois. 

Les politiques relayent souvent cette morbide statistique : 1 agriculteur français se suiciderait tous les deux jours.  Datant de 2016, celle-ci n’a pas été remise à jour depuis. Mais elle reflète une tragédie bien réelle. La Mutualité Sociale Agricole a publié un rapport en juillet 2023 relevant qu’en 2020, “les consommants de soins du régime agricole de 15 à 64 ans ont un risque de mortalité par suicide supérieur de 30,9 % à celui des assurés tous régimes”, grimpant jusqu’à 77,3 % chez les propriétaires agricoles. En France, avec 416 000 exploitations, le secteur  agricole est crucial pour l’économie mais aussi pour la souveraineté alimentaire. Les agriculteurs dénoncent une concurrence déloyale à cause des normes différentes appliquées dans les pays avec lesquels la France et l’Europe ont conclu des accords de libre échange. Les distributeurs conservent la main forte dans les négociations des prix, laissant les producteurs sans autre option que de vendre à bas prix malgré l’inflation et notamment l’augmentation de l’électricité qui les touchent directement.

Le gouvernement se veut rassurant

Ce 21 février, trois jours avant le début du Salon de l’Agriculture, Gabriel Attal a donné une conférence de presse à Matignon pour rassurer les agriculteurs. Une véritable opération de déminage de la crise agricole qui menace les visites protocolaires prévues à l’occasion du SIA.

Les agriculteurs tarnais déjà mobilisés le 14 novembre dernier à Albi ©Emilie Cayre

Nous ne mentirons pas, nous ne trahirons pas » a assuré le premier ministre. Il a annoncé plusieurs mesures, dont le renforcement de la loi Egalim visant à favoriser une juste rémunération des exploitants, à revaloriser le métier en plaçant l’agriculture « au rang des intérêts fondamentaux de la nation » et à faciliter de la venue de travailleurs étrangers. Il a aussi déclaré l’abandon de l’indicateur actuel pour mesurer la réduction de l’usage des pesticides défendu par les ONG mais non appliqué dans les pays européens. « En trois semaines, nous avons abouti pour 8 engagements sur 10 » s’est-il félicité en reprenant sa liste de 62 engagements à la faveur des agriculteurs. 

La veille, Emmanuel Macron a reçu Arnaud Rousseau, le président de la  FNSEA et celui des Jeunes Agriculteurs, Pierrick Horel, pour étudier la situation. “On attend des prises de parole et des échanges directs avec les agriculteurs. Pas question qu’il déambule dans les allées, comme d’ordinaire”, a déclaré Arnaud Rousseau suite à son entrevue avec le Président de la République. 

Lundi 19 février, une quarantaine de tracteurs défilaient dans le centre de Marseille, d’autres actions sont menées depuis le début de semaine à Chalons-en Champagne, Reims, Dunkerque et d’autres villes encore. En Espagne, des centaines d’agriculteurs  se rendent à Madrid, la crise agricole concernant plusieurs pays d’Europe dont l’Allemagne, les Pays-Bas ou encore la Grèce. 

« Nous sommes en train de finaliser un dispositif pour alléger les impôts et les charges sociales des éleveurs dont la valeur du cheptel augmente, notamment du fait de l’inflation. Au total, c’est 150 millions d’euros qui seront mobilisés pour nos éleveurs, là aussi, avec une entrée en vigueur de la mesure dès cette année« , a déclaré Gabriel Attal. 

Suite à la conférence de presse du premier ministre du 21 février, Serge Bousquet-Cassagne, président de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne, a pour sa part estimé sur BFM que le Salon de l’agriculture allait “mal se passer« .

Annonces de Gabriel Attal: le Salon de l’agriculture « va mal se passer » assure Serge Bousquet-Cassagne (président Coordination rurale du 47) pic.twitter.com/Hbyhu39Jj0

— BFMTV (@BFMTV) February 21, 2024

Le projet de loi d’orientation ne cesse d’être modifié, on ne sait pas trop où on en est. On veut des orientations claires : comment va se traduire la souveraineté dans les installations, les transmissions de fermes ? On attend des annonces claires du président de la République au Salon de l’agriculture« , a déclaré pour sa part à l’AFP Yohann Barbe, porte-parole de la FNSEA tout en saluant malgré tout « des avancées certaines » et « la reconnaissance » du secteur.

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Photo à la Une : ©Thierry Lindauer


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